Le Fait main

Depuis quelques années maintenant, le « fait main » s’est taillé une place de choix dans les habitudes des consommateurs toujours plus exigeants et surtout plus soucieux de ce qu’ils achètent. Les bouleversements que la société occidentale a vécus depuis peu avec notamment la crise financière et l’arrivée de la concurrence chinoise a eu pour effet de nous questionner sur nos habitudes de consommation et ainsi les modifier en connaissance de cause.

C’est donc dans une logique de soutien à la production locale et de prise de conscience

des impacts environnementaux que les gens ont changé leurs comportements pour

s’intéresser aux étapes de production et découvrir que leurs régions sont une source de

matières premières intéressantes pour ne pas dire nobles.

En effet grâce à des créateurs de tout acabit des produits bruts encore non transformés

ont suscité un intérêt grandissant chez le consommateur lambda. Il en est de même avec

l’essor de produits nés de matières déjà utilisées et destinées à la déchetterie: le

recyclage prend une place importante dans les créations faites main. Que les raisons

soient économiques ou écologiques, il est toujours intéressant d’assister à la naissance

d’un produit qui offre une seconde vie à un vêtement, du bois flottant ou encore une

simple horloge. Le fait main est une source de développement des énergies créatives et

novatrices: les idées ne manquent pas, les créateurs en herbe ou confirmés s’en donnent

à coeur joie et le public est au rendez-vous tant il est appréciable d’acquérir un produit

unique, recyclé et réalisé par un compatriote.

Il y a dans cette nouvelle habitude de consommation locale l’idée de valoriser les

richesses et les ressources de son territoire: on achète quelque chose faite par ses

concitoyens, qui nécessite un savoir-faire artisanal et parfois local, voire traditionnel et

patrimonial, et on se félicite de posséder un tel trésor. Il y a beaucoup de fierté à posséder

un tel objet non par orgueil mais parce qu’on a l’impression de participer à la grande

chaîne de consommation en encourageant les commerces locaux et les créateurs de chez

nous. Car il ne faut pas oublier qu’une consommation responsable et bien renseignée

passe à la fois par les producteurs mais aussi les consommateurs. On ne peut donc que

se féliciter de l’expansion que connaît aujourd’hui le fait main auprès du public.

Ce qui est également appréciable c’est la proximité qu’il existe entre les deux pendants de

la chaîne commerciale: pas d’entremetteur, le consommateur achète directement à la

source, il sait d’où proviennent les produits qu’il commande. Une transparence qui rassure

les clients et un circuit court plus intéressant pour les créateurs sur le plan économique

mais aussi humain. C’est une relation qui s’établit sur la confiance et qui se traduit

directement par l’expression de satisfaction des consommateurs. Il n’y a pas de discours

truqués, on ne peut pas tricher.

Etsy a su proposer très vite une plate-forme destinée à la fois aux créateurs et aux

potentiels acheteurs. Peu à peu une communauté mondiale s’est constituée et un réseau

international permet aujourd’hui de découvrir des créations faites main à travers le monde.

Mais si internet a permis la démocratisation du fait main et sa commercialisation à travers

la planète, il n’en reste pas moins qu’un contact humain reste essentiel pour être en

adéquation avec les valeurs sur lesquelles reposent ce nouvel intérêt pour le fait main.

C’est notamment grâce aux marchés des créateurs organisés un peu partout dans le

monde qu’on peut découvrir les talents d’ici et d’ailleurs. Etsy encourage ces

rassemblements à l’image de celle qui eut lieu à Québec en septembre 2014 au Domaine

de Cataraqui. Une communauté de créateurs qui eut l’occasion de présenter leurs produits

autrement que par l'Internet et de rencontrer leurs clients. Un contact direct qui permet

également d’échanger entre eux et de s’entraider : conseils, encouragements, astuces et

adresses de fournisseurs, tout est bon pour s’améliorer et se soutenir. Il reste qu’ils

apprécient aussi ce genre d’événements simplement parce qu’ils peuvent recueillir les

appréciations de leur travail directement à la source. Quant aux clients, ils aiment

certainement le fait de mettre un visage sur un logo, un nom de petite entreprise, des

créations faites main.

Le fait main est donc une activité qui suscite énormément d’enthousiasme tant ses points

positifs sont légion et dépasse aujourd’hui le cadre strictement commercial. En effet,

nombreux sont celles et ceux qui s’y mettent pour le simple plaisir de créer et ressentir

l’émerveillement de voir naître sous ses yeux un objet grâce à ses propres mains. C’est

d’ailleurs prouvé, l’activité manuelle apporte un apaisement mental, elle permet de se

concentrer sur une action tout en évacuant les tensions accumulées au cours de la

semaine, faire le vide dans sa tête pour se consacrer à un projet qui se matérialise sous

ses yeux. Ressentir la satisfaction de réaliser quelque chose entièrement, jusqu’au bout,

éprouver le temps et sa patience, découvrir ses propres exigences, alimenter son

imagination, être dans l’action plutôt que dans l’immobilisme.

En un mot comme en cent, le fait main semble avoir de beaux jours devant lui et c’est tant mieux.

Par Audrey Djadel

La lecture, l’écriture et la création sont au coeur de mes intérêts personnels et professionnels. Petite déjà je m’amusais à inventer des histoires sur fond de collages, amalgamant divers personnages de dessins animés pour faire surgir une nouvelle aventure encore plus trépidante. Diplômée en linguistique, j’ai ensuite poursuivi mon cursus universitaire en communication spécialisée pour la culture. Ainsi je suis devenue chargée de communication pour les instituts culturels, ayant toujours à coeur de raconter et défendre les créateurs de notre temps. En 2014 j’ai démarré Les O de miss O, un blogue qui, entre autres choses, met en avant les talents du fait main qui me séduisent et m’inspirent. Si c’est avec les mots que je me sens le plus à l’aise, je ressens ces derniers temps l’envie de m’exprimer autrement, avec les mains: couture, photo, collage… je touche à tout et explore un peu plus ce que nos créateurs et créatrices expérimentent au quotidien.